Le message de Dr MITA à ces confrères de Kodaira : Pourquoi j’ai quitté Tokyo ?

Dr Shigeru Mita invite ses confrères à se préoccuper de la protection contre les radiations.

Dr Mita Le Docteur Shigeru MITA qui a récemment déménagé pour Okayama-ville (préfecture d’ Okayama) pour y ouvrir une nouvelle clinique, a écrit un court essai dans un bulletin de l’association des médecins de Kodaira (métropole de Tokyo).
Bien que cette essai ne s’adresse pas au grand public, il a été cité dans un magazine hebdomadaire par e-mail par le journaliste Kota Kinoshita, qui a organisé des actions pour inciter les gens à quitter les zones touchées par les radiations (y compris Tokyo) depuis le 11 mars 2011.
A de nombreuses reprises, lors de conférences et de réunions publiques, le Dr Mita et Mr Kinoshita ont signalé le danger des radiations et ont appelé à une action immédiate de radioprotection.


Pourquoi ai-je quitté Tokyo ?

Dr Shigeru MITA (Clinique Mita)
A mes confrères médecins,

J’ai fermé en Mars 2014 la clinique qui a servi la communauté de Kodaira depuis plus de 50 ans, depuis la génération de mon père; et j’ai ouvert une nouvelle clinique MITA à Okayama le 21 avril.

J’ai été membre du conseil d’administration de l’association médicale de Kodaira depuis 1990, lorsque j’ai commencé à pratiquer la médecine dans la clinique de mon père. Pendant les dix dernières années j’ai travaillé à préparer une réponse urgente en cas de catastrophe dans la ville.

A Tokyo, la première mission est de se préparer à gérer un tremblement de terre.

Dans le cas d’un tremblement de terre dans le Sud Est, hautement prévisible, il est raisonable d’envisager un scénario de fusion du coeur dans la centrale nucléaire de Hamaoka (préfecture de Shzuoka), suivie d’une contamination radioactive de Tokyo.

J’étais préoccupé par la possibilité d’une contamination de Tokyo; j’avais demandé plusieurs fois à l’association médicale, au conseil municipal et au département local de santé publique de stocker de l’iode médical. A chaque fois ma demande a été rejetée, la raison invoquée était qu’on ne prévoyait pas la survenue d’un tel événement à Tokyo. Il n’y avait donc aucun plan pour se préparer à cet éventualité.

Au cours de l’après-midi du 11 mars 2011, Tokyo a subi de lentes mais grandes secousses du tremblement de terre. J’ai pensé «C’est ce qu’on appelle des mouvements sismiques de longue période. Le tremblement de terre de la mer du Sud et sa conséquence, l’accident de la centrale nucléaire d’Hamaoka, sont finalement arrivés». En fait l’origine du tremblement de terre était dans le Tohoku. La température des réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Dai Ichi s’est élevée, elle a causé de massives explosions suivies de fusions des coeurs et de perforation des cuves.

Il est certain que le Japon de l’Est et la métropole de Tokyo ont été contaminés.

La contamination du sol se mesure en Bq/kg.
Dans les 23 districts de la métropole de Tokyo, la contamination de la partie orientale est de 1000-4000 Bq/kg et celle de la partie occidentale est de 300-1000 Bq/kg (Césium 137 seul).
La contamination de Kiev, capitale de l’Ukraine est de 500 Bq/kg (Cs 137 seul).
En moyenne, après l’accident de Tchernobyl, l’Allemagne de l’Ouest était à 90 Bq/kg, l’Italie à 100, et la France à 30 Bq/kg.
De nombreux problèmes de santé on été signalés en Allemagne et en Italie.
A Shinjuku, site de la mairie de Tokyo, on mesurait 0,5 à 1,5 Bq/kg avant 2011, Actuellement, Kodaira est contaminée à 200-300 Bq/kg.

Je vous recommande à tous de regarder le programme de la NHK «ETV spécial: l’accident nucléaire de Tchernobyl: rapport sur un pays contaminé»; il est disponible sur internet. Je pense qu’il est important de savoir ce qu’ont vu et perçu ceux qui ont visité le Belarus et l’Ukraine et entendu les récits des habitants; et d’écouter ceux qui ont servi dans les opérations de secours à Tchernobyl il y a plus de 20 ans.

Leur expérience montre que que Tokyo ne devrait plus être habitée et que ceux qui insistent pour vivre à Tokyo doivent faire des pauses régulières dans des régions plus sûres.

Des problèmes tels que la dépopulation et le déclin de l’état continuent de peser actuellement sur la vie des 2° et 3° génération d’Ukrainiens et de Biélorusses; je crains que ce ne soit l’avenir de l’Est du Japon.

Depuis décembre 2011, j’ai réalisé des échographies thyroïdiennes, des tests fonctionnels de la thyroïde, des analyses sanguines générales et biochimiques chez environ 2.000 personnes. La plupart étaient des familles de la métropole de Tokyo préoccupées par les conséquences des radiations.

J’ai observé que les globules blancs, spécialement les neutrophiles, diminuaient chez les enfants de moins de 10 ans. Il y a des cas de diminution significative du nombre de neutrophiles chez des enfants nés après le tremblement de terre (<1000). Dans les deux cas la situation tend à s’améliorer en allant vivre dans l’Ouest du Japon (neutrophiles 0→4.500).
Les patients signalent des saignements de nez, une perte des cheveux, un manque d’énergie, des ecchymoses sous cutanées, des hémorragies urinaires visibles, des inflammations de peau, de la toux et d’autres symptomes divers non spécifiques.

Kodaira, dans l’Ouest de Tokyo est l’une des zones les moins contaminées du Kanto; cependant même dans cette zone nous avons commencé à constater des changements dans le sang des enfants vers le milieu de l’année 2013.

La contamination s’accroit à Tokyo, aggravée par la concentration urbaine des radiations, ou parce que les systèmes d’assainissement urbain, tels que le système des eaux usées, la collecte et l’incinération des ordures concentrent les radiations, car les déchets contaminés sont rassemblés et compressés. Les mesures effectuées par des groupes de citoyens ont montré que le niveau des rayonnements s’est fortement accru ces deux dernières années dans le lit des rivières Kawabori à Higashiyamato et Higashimurayama à Tokyo.

Parmi mes préoccupations, j’ai inclus des symptomes rapportés par des patients en général, tels que un asthme ou une sinusite persistants. Les patients montrent une amélioration notable lorsqu’ils quittent la région.

J’observe aussi de nombreux cas de «Polymyalgie Rhumatismale» caractérisés par des plaintes telles que «difficulté à se retourner», «incapacité à s’habiller et se déshabiller», «incapacité à se lever» chez mes patients d’âge moyen ou plus âgés. Seraient-ce les mêmes symptomes que ceux du rhumatisme musculaire notés à Tchernobyl ?

On peut également noter des modifications des symptômes de maladies contagieuses comme la grippe, le syndrome pied-main-bouche et le zona.

De nombreux patients signalent ressentir des symptômes non familliers ou percevoir des changements inhabituels dans leur corps. Peut-être se sentent-ils à l’aise pour m’en parler, sachant que la clinique a affiché, immédiatement après l’accident, une information sur les symptômes possibles liés aux radiations.
Beaucoup de jeunes couples avec de jeunes enfants et des femmes inquiètes au sujet de leurs petits-enfants viennent à la clinique et s’engagent résolument dans la discussion; aucun patient ne rejette mes opinions critiques sur les conséquences des radiations.

Depuis le 11 mars, chaque habitant de l’Est du Japon, y compris Tokyo, est une victime et chacun est concerné.

Nous avons découvert que nos connaissances dans la discipline de radiologie sont complètement inutiles dans le cas d’un désastre nucléaire. Le mot-clef est ici «irradiation interne de bas niveau au long cours». C’est très différent d’une irradiation médicale ou d’une simple exposition externe aux radiations.
Je ne veux pas m’impliquer dans les questions politiques; cependant je dois déclarer que les politiques de l’OMS, de l’AIEA ou du gouvernement japonais ne sont pas fiables. Elles sont simplement trop éloignées des dures réalités auxquelles les gens de Tchernobyl sont confrontées aujourd’hui.

Les patients de l’Est du Japon que je vois ici à Okayama ont confirmé les opinions que j’avais depuis longtemps, depuis que j’étais établi à Tokyo. Les gens souffrent vraiment de cette absence totale de soutien. Depuis le 11.3 les mères ont cherché désespérément l’information pour protéger leurs enfants. Elles ont cherché l’information au milieu de leur environnement hostile de Tokyo où elles ne peuvent plus faire confiance ni aux bureaux du gouvernement ni aux écoles de leurs enfants.
Les médecins de famille sont prêts à écouter à propos d’autres symptomes, mais à la plus petite mention des radiations leur visage s’empourpre et ils ignorent les questions des mères.
Les mères ne pourraient même pas en parler à leurs amis tant l’atmosphère est devenue de plus en plus étouffante à Tokyo.

Je crois qu’il est de notre devoir de médecins d’informer et d’augmenter la sensibilisation des japonais. C’est notre rôle d’experts dépositaires de connaissances sur le santé que le grand public ne possède pas. Trois années se sont rapidement écoulées depuis le désastre. Ni enseignements ni livres médicaux n’ont été réalisés au sujet des maladies dues aux rayons.

Néanmoins, si le pouvoir de sauver nos concitoyens et les générations futures existe quelque part, il ne se trouve pas au sein du gouvernement, ni d’aucune société académique, mais dans les mains de chaque médecin clinicien.

Les habitants de Tokyo ne sont malheureusement pas en situation de s’apitoyer sur le sort des régions du Tohoku affectées car ils sont eux mêmes victimes. Le temps presse. J’ai pris un temps d’avance et j’ai évacué vers l’ Ouest.

Mes confrères médecins, je vous attends ici.

Et aux gens du Japon de l’Est qui hésitez encore, tous mes efforts visent à faciliter et rendre possible votre évacuation, votre réinstallation, ou un temps de récupération dans l’Ouest du Japon.

Dr Shigeru MITA

Le nucléaire dans le monde : fin de la « renaissance »

Par Agnès Sinaï

Vingt ans après sa première édition, le World Nuclear Status Report 2012 dresse l’inventaire d’une industrie nucléaire en perte de vitesse dans le contexte actuel de crise financière, et encore frappée par les effets de Fukushima.

Durant la seule année 2011, la situation mondiale du nucléaire a été bouleversée : 19 réacteurs nucléaires ont été définitivement déconnectés dans le monde, tandis que 7 étaient mis en service. Quatre pays ont annoncé leur sortie du nucléaire : l’Allemagne, la Belgique, la Suisse et Taiwan. Cinq autres se sont retractés : l’Egypte, l’Italie, la Jordanie, le Koweit et la Thaïlande. L’Iran est le seul pays au monde à s’être engagé dans un programme électro-nucléaire commercial, depuis la Roumanie en 1996. Les chantiers sont arrêtés en Bulgarie et au Japon.

Etabli par les experts indépendants Mycle Schneider et Antony Froggatt en collaboration avec Julie Hazemann, le World Nuclear Industry Status Report 2012 résume la situation : en 2011 quatre nouveaux chantiers de réacteurs ont été lancés, et en 2012 deux. La France, l’Inde, le Brésil et les Etats-Unis ont annulé les nouveaux chantiers. Aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, des compagnies clés se sont retirées des projets. La certification de nouvelles technologies de réacteurs est reportée, c’est le cas du réacteur franco-allemand EPR qui ne sera pas agréé aux Etats-Unis avant fin 2014. Dans divers pays, les chantiers en cours ont pris du retard, en Chine, en Arménie, en Finlande et aux Etats-Unis. Sur 59 unités en construction dans le monde, au moins 18 connaissent des retards de plusieurs années. Le projet de la centrale Watts-Bar-2 aux Etats-Unis bat tous les records : la construction a commencé en 1973, et la mise en service a été reportée jusqu’en 2015 ou 2016.

Chantiers en déshérence et dérive des coûts

Quant aux nouveaux candidats à l’industrie nucléaire, tels que le Bangladesh, le Belarus, l’Indonésie, la Jordanie, la Pologne, l’Arabie saoudite, la Turquie, les Emirats arabes unis et le Vietnam, ils reculent devant les contraintes financières et les difficultés d’implantation liées à leurs conditions climatiques spécifiques, comme l’absence d’eau pour refroidir les réacteurs. Dans ces pays, l’implantation d’énergies renouvelables et l’utilisation du gaz naturel s’avèrent moins coûteuses et plus facile à implanter.

Un gendarme du nucléaire bien peu indépendant

par Agnès Sinaï, Le MONDE diplomatique, décembre 2012

Dans les méandres de l’Agence internationale de l’énergie atomique

Un gendarme du nucléaire bien peu indépendant

Impuissante à réguler la circulation des matières fissiles et à régler le dossier iranien, l’Agence internationale de l’énergie atomique a deux visages : zélatrice du nucléaire civil d’un côté, gendarme du nucléaire militaire de l’autre. Elle défendra les vertus de l’atome y compris à Fukushima, où elle tiendra sa conférence ministérielle du 15 au 17 décembre.


C’est à Vienne, la capitale autrichienne, dans un paysage de ville nouvelle entre le Danube, un échangeur autoroutier et le métro aérien, qu’est sise l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Au cœur de cet ensemble monumental de 4 500 bureaux cerclé de barbelés, la dalle désertique du complexe des Nations unies accueille une conférence sur la sûreté nucléaire après la catastrophe de Fukushima (Japon) survenue en mars 2011. Des véhicules diplomatiques stationnent devant l’entrée, où des grappes de dignitaires s’engouffrent avant de plonger discrètement vers les sous-sols par des escaliers mécaniques en cascade.

A la tribune, le diplomate japonais Amano Yukiya, directeur général de l’AIEA depuis 2009, s’adresse à un parterre de délégués issus des 153 pays membres. Ministres, représentants d’agences nationales du nucléaire, industriels de l’atome et experts de la radioprotection s’inquiètent de voir la renaissance annoncée dans les années 2000 compromise par l’accident japonais. M. Amano n’en espère pas moins « une nouvelle ère », avec des critères de sûreté des centrales renforcés et globalisés. Depuis juin 2011, l’agence diffuse d’ailleurs des communiqués lénifiants sur l’évolution des six réacteurs de la centrale de Fukushima, compilations des informations transmises par le groupe électronucléaire Tokyo Elec-tric Power Company (Tepco) et l’autorité de sûreté nucléaire japonaise, la Nuclear and Industrial Safety Agency (NISA). Surveillance et promotion du nucléaire : c’est le cocktail paradoxal qui définit cette agence pas comme les autres…Suite de l’article

 

Une conférence mémorable et puis ….un coup d’État

Bamako mars 2012

La conférence sur l’Uranium, la santé et l’environnement à Bamako du 16 au 18 mars 2012 avait la particularité d’avoir été organisée par une initiative citoyenne d’une petite Commune, Falea au Mali en partenariat avec l’IPPNW1 – les médecins pour la prévention de la guerre nucléaire, le Uranium network et l’alliance africaine de l’uranium AUA2. Le centre international de conférence a été pendant trois jours le point de rencontre entre experts du nucléaire, médecins et activistes, curieux de la société civile et une grande délégation d’habitants de la Commune de Falea, qui s’oppose au projet de la première mine d’uranium du Mali.

David FIG, Afrique du Sud : sociologue de l'environnement, économiste politique

Après les mots d’accueils exprimés par le Professeur Many CAMARA de l’initiative citoyenne ARACF de Falea, le président de l’IPPNW Suisse, Professeur Andi NIDECKER insiste sur l’urgence de la mise à disposition d’une information scientifique pour la protection des populations confrontées aux travaux d’exploration de l’uranium et aux possibles montagnes de déchets d’une mine projetée. Il conclue face aux dangers incalculables de cette technologie de laisser ce minerai, sans le toucher, reposer là où il est : dans le sous sol. Le ministre des mines du Mali, Amadou CISSÉ, salue l’importance de cette rencontre scientifique et souhaite que ces connaissances soient respectées lors d’une mise en place de l’extraction du minerai. Il poursuit : « La lutte contre la pauvreté n’est que trop souvent accompagnée d’un manque d’information. Il va falloir inclure la population locale et éviter les fautes qui ont été commises ailleurs. » Gunter Wippel de l’uranium Network donne un aperçu sur les techniques et les dangers de l’uranium. Son intervention est complétée par l’ingénieur en physique nucléaire et responsable du laboratoire de la CRIIRAD en France, Bruno Chareyron. Connaissant la situation à Faléa, il dresse en outre une liste de toutes les méfaits commis par la société qui explore le terrain, la canadienne Rockgate Capital Corp3. « Même la phase d’exploration est souvent accompagné par des incidents provoqués par le radon4, un gaz hautement toxique. » Partout où l’on a extrait de l’uranium on laisse des montagnes de poussières radioactives qui continuent à contaminer les populations des alentours et empoisonner les nappes phréatiques.

Cette introduction est suivie par les récits de personnes venant du Gabon, de la Namibie, du Niger, du Congo, de l’État New Mexico aux USA, de Jadugoda en Inde, de l’Afrique du Sud et du Canada pour témoigner sur les effets de l’extraction de l’uranium dans leurs pays. Esther Yazzie – une indienne de la tribu des Navajo, raconte, plein d’émotion la situation désastreuse dans son pays natale après 60 ans d’extraction de ce minerai. Elle rappelle les liens qui nous lient à la terre et la nécessaire vigilance de la société civile. Chez les Navajo, ils ont perdu une génération tout entière : mort du cancer des poumons suite à l’inhalation du gaz radon dans les mines et leurs environs. Le rapport de Madame Salli RAMATOU du Niger5 dévrait être connu partout. Malgré les promesses exprimées il y a 40 ans, au début des 159 mines d’uranium dans ce pays, les droits de l’homme y sont bafoués, le développement et le bien être inexistant. Le responsable principal est AREVA. Cette société française, numéro un mondial du nucléaire, a méticuleusement veillée à ce que le taux de pauvreté reste collé au niveau de 1996. Le Niger souffre d’une contamination radioactive presque généralisé : des montagnes de poussières de déchets radioactifs de l’ordre de 35 millions de tonnes sont constamment érodés par les vents. Mme RAMATOU conclu son récit avec la phrase : « Deux ampoules sur trois brillent en France grâce au combustible nucléaire du Niger, qui est aujourd’hui un des pays les plus pauvres de la terre ».

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Doug Brugge, Professeur à la Tufts Medical School de Boston aux Etats Unis,

Trois scientifiques et médecins, Doug BRUGGE, Professeur à la Tufts Medical School de Boston aux Etats Unis, Mme Dale DEWAR du Canada, également médecin, et le Docteur Shri PRAKASH de Jadugoda en Inde6 ont chacun présenté leurs analyses des effets de l’uranium et sa radioactivité sur la santé de la population : des leucémies, des cancers de poumons, des disfonctionnement rénales, des déformations congénitales héréditaires en constante hausse.

Marc Ona ESSANGUI rappelle que la société AREVA a aussi sévit au Gabon. Aujourd’hui, après la fermeture en 1999 du site Mounana, des milliers d’habitants n’ont pas d’autre choix que de préparer leur repas quotidien avec une eau contaminée par la radioactivité. « Et Areva planifierait la réouverture des mines au Gabon. »

Golden MISABIKO venu à Bamako de la République démocratique du Congo s’étonne du nom que porte son pays. Les mots république et démocratique le fâchent. Après avoir publié une enquête sur AREVA chez lui, il a été incarcéré le lendemain. Il a du s’exiler. L’exploitation des mines est le plus rentable là ou les multinationales ne sont pas contraintes de respecter les Droits de l’homme, des lois environnementaux, un État de Droit ou une démocratie qui se respecte.

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Podium Bamako

Nouhoum KEITA, responsable de communication de l’initiative citoyenne ARACF décrit, que grâce à la mobilisation locale et le réseau internationale de solidarité, ARACF est devenu un acteur incontournable dans la procédure „de bonne gouvernance“ de l’Étude d’impact environnemental et social. Pourtant, il doit reprocher au gouvernement et au ministères concernés un manque de suivi et des promesses non tenues de mise à disposition d’informations. Les élus, des habitants et le chef du village traditionnel appuient l’intervention de Nouhoum par des commentaires. On veut et on va dire non à ce projet d’extraction d’uranium. On sent une certaine fierté qui s’exprime. Une détermination genre on ne lâchera rien. Des Falois remercient les hôtes venus de loin pour les appuyer……

L’incident

Le représentant du ministère des mines Seydou KEITA fait l’éloge de la richesse minière du Mali, qui exporterait annuellement environ 50 tonnes d’or. Il omet d’indiquer la valeur de ce pactole et la part qui reste dans le pays annuellement7. Mali est le troisième producteur d’or du continent africain ce qui est ici assez invisible. Le porte parole du ministère présente – powerpoint tableau à l’appui – un schéma de répartition exemplaire. Une sorte de transparence de façade ou l’information essentielle reste cachée. Une certaine grogne se fait sentir. Il poursuit que le Mali sera capable de réaliser l’extraction de l’uranium sans dégâts pour les populations… « grâce à dieu qui a donné l’intelligence aux maliens. Tant qu’il y aura des multinationales, qui s’intéressent pour nos matières premières, nous les accueillerons, vous pouvez discuter ici ce que vous voulez ». Dans sa lancée il reproche aux invités d’être venus uniquement pour faire des vacances au Mali. Ceci était le mot de trop. Un débat houleux s’instaure. Mais assez rapidement les organisateurs réussissent à remettre une ambiance d’écoute dans la salle. Professeur Many CAMARA exige du représentant du ministère des mines une excuse publique avant que la parole puisse être donnée aux intervenants suivants. Ses excuses, après de longues phrases insignifiantes, ont été acceptées par acclamation. Seydou KEITA

Madame RAMATOU rappelle la situation du Niger et la chance du Mali, où il est encore temps et possible d’éviter l’extraction d’uranium. Une longue liste de doléances et critiques faces à la société canadienne Rockgate Capital Corp (RCT) est dressée par une série d’intervenants de Faléa : les forages ont provoqué une pollution de puits d’eau ; mais les livraisons d’eau potable par RCT ont cessées après quelques jours ; des foreuses 24h sur 24 à proximité des huttes habitées ; des vaches, qui sont morts d’une manière inexplicable après avoir bu de l’eau des trous de forage mal sécurisés….

La possibilité de dire non au projet de la mine sera la consultation populaire. C’est une mesure qui fait partie de l’Étude d’impact environnemental et social. Mais est ce que ce sera seul une petite délégation des habitants qui aura un droit de vote ou est ce que ce sera une décision ou chacun et chacune des 17’000 habitants auront leur mot à dire ? Est ce que une décision négative pour la multinationale sera respecté ? Et la population, est ce qu’elle pourra compter sur le gouvernement ?

La rencontre à Bamako confirme l’importance de ces échanges d’informations, la nécessite de la mise en réseau d’acteurs les plus divers et l’exigence du respect des principes démocratiques, qu’il faut arracher de leur utilisation purement décorative. Les habitants du village de Faléa veulent être pris au sérieux. Les habitants de l’ensemble du continent africain ne pourront pas se satisfaire de ce que le P-DG de la société PALADIN Energy à exprimé : „The Australians and Canadians have become oversophisticated in environmental and social consent over Uranium Mining. The Future is Africa.“ (Executive Director Paladin Energy Australia 2006)8

Épilogue :

Quelques participants de la conférence se rendaient à Falea. Cinq heures sur la nouvelle route vers Keniéba, à la frontière vers le Sénégal et ensuite un chemin de terre rocailleux sur 80 km. Encore quatre heures. La route asphaltée a été construite d’ailleurs par une coalition de sociétés chinoise, japonaise et française. Les travaux ont été financée par divers fonds étatiques de développement en vue des nombreux projets d’extraction minière dans cette région.

Au retour à Bamako : Coup d’État. Le président Amadou Toumani Touré (ATT) et un certain nombre de ses ministres, des généraux et des colonels ont été arrêtés, l’aéroport et les frontières fermés. On parle de très peu de morts. La population est resté très calme et retenu. Quelques pillages et confiscations de véhicules ont eu lieu. Déjà trois jours après on a l’impression d’une certaine normalisation. Les soldats sont appelés à retourner dans leurs casernes. La junte a ordonnée la reprise des activités pour mardi 27 mars à partir de sept heures trente du matin. Elle a déclaré d’avoir pris le pouvoir pour redresser la démocratie et restaurer l’État. L’arrogance du ministre et surtout de son représentant lors de la rencontre « Uranium Santé et environnement » a été rejeté très vivement par les habitants de Faléa. Une grogne s’est manifesté au Palais du Congrès. Nous venons d’apprendre que de nombreux Falois espèrent que les jeunes Capitaines du Comité Nationale pour le Redressement de la Démocratie et la Restauration de l’État (CNRDRE) ne laisserons pas durer les habitudes prises par les sociétés minières, de verser des dessous de tables qui se transforment en villas ministérielles et pots de vins, des miettes pour la population et de transférer les bénéfices dans les paradis fiscaux.

Littérature : Dossier de préparation de la conférence de Bamako : à commander auprès de : Uranium Network.org

AREVA en AFRIQUE par Raphaël Granvaud, Edition Agon et Survie ISBN 978-2-7489 -0156-6

L’avenir radieux, Nicolas LAMBERT, www.unpasdecote.org

Le scandale de la France contaminée : DVD Pièces à conviction FR3

L’ensemble des débats a été enregistré et filmé. La conférence a été traduite également en bambara. Ces précieuses interventions seront utilisées pour radio-difffusion notamment par la Radio locale de Faléa. Grâce à l’aide de la Solidarité Internationale de la République du Canton de Genève ces contributions scientifiques pourront être traduites dans les quatre langues qui sont parlé à Faléa. Pour de plus amples informations : lammler(at)forumcivique.org