Appel à solidarité de la revue durable

Source : La revue durable

une revue franco-suisse indépendante
cinq numéros par an
des articles clairs et denses en informations utiles
l’actualité internationale de l’écologie et du développement durable : débats, manifestations, nouveautés éditoriales, campagnes
des interviews de personnalités engagées

La revue durable lance un appel de solidarité pour FALEA

L’espoir reste de mise

Dans le visage et la voix de Many Camara se lit et s’entend la conviction que l’espoir reste de mise, qu’il y a toujours quelque chose à entreprendre, qu’il n’est jamais trop tard pour faire preuve d’intelligence face à l’adversité. Même si cette adversité prend la forme, en l’occurrence, d’une armée d’excavatrices géantes prêtes à réduire en bouillie des roches radioactives sous les champs cultivés depuis des millénaires par des paysans qui n’ont rien demandé à personne. Les excavatrices ne sont pas des chars d’assaut qui avancent impitoyablement : nous avons le pouvoir de les ralentir, de les orienter, voire de les arrêter, prouve par ses actes Many Camara, émissaire en Europe de l’Association des ressortissants et des amis de la commune de Faléa (Aracf), située à l’ouest du Mali, et touchée de plein fouet par la quête de ressources minières. Tout dépend de nous, de notre faculté à vouloir d’autres pratiques et à agir pour donner une pleine expression à cette volonté. Là où nombreux sont ceux qui pleureraient devant l’incommensurable propension humaine à tout détruire depuis que l’humanité en a les moyens techniques et industriels, là où beaucoup verseraient dans une rage désespérée susceptible de déboucher sur une révolte violente à l’image du quatuor à l’oeuvre dans Le gang de la clef à molette d’Edward Abbey, Many Camara et l’Aracf ont des propositions constructives à faire aux villageois et aux paysans de Faléa, à l’entreprise minière canadienne qui s’apprête à forer son sous-sol, aux institutions maliennes et à la société civile mondiale. L’Aracf, fondamentalement, compte sur la solidarité. Et ce qui paraît banal au premier abord est en fait, à y regarder d’un peu plus près, révolutionnaire. C’est d’abord, bien sûr, une solidarité traditionnelle en Afrique que l’Aracf vise, celle qui lie les personnes originaires d’un village à leurs familles restées au pays. Mais elle cherche aussi, de façon très ambitieuse et novatrice pour le projet dont il est question ici, à stimuler une solidarité à l’échelle du monde.

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FALEA la verte

Les machines, routes et travailleurs qui vont bientôt débarquer

L’Aracf veut documenter de A à Z, du point zéro, c’est-à-dire avant l’exploitation des mines de Faléa, au point d’arrivée, qui est encore ouvert, l’histoire et le devenir de ces terres et des populations qui y vivent. Les machines, routes et travailleurs qui vont bientôt débarquer menacent de laminer cette région aujourd’hui productive et préservée. Tout cela à cause des besoins insatiables des pays « riches » en énergie, en l’occurrence nucléaire, et en métaux, en l’occurrence l’aluminium. Voilà pourquoi l’Aracf et les organisations européennes, (essentiellement suisses et françaises) impliquées dans le sauvetage de Faléa lancent, notamment via LaRevueDurable, un appel à l’aide, au soutien, à l’engagement. Elles veulent créer une veille internationale de collectivités solidaires et établir des partenariats avec le milieu académique partout dans le monde.

Veille internationale de collectivités solidaires

La commune de Faléa recherche des correspondants dans une cinquantaine de collectivités du monde, à l’instar de Genève, afin de : • fournir un appui institutionnel à l’Aracf ; • rassembler assez de moyens pour finaliser l’enquête « Point zéro » ; • financer une contre-expertise officielle avec l’Oeko-Institut, basé à Darmstadt, en Allemagne ; • prendre en charge la réalisation d’autres études de référence : impacts sanitaires, sur la biodiversité et les patrimoines culturel, matériel et immatériel ; • procéder à la rapide remise en route de la radio communautaire pour que l’information et l’expression des populations locales puissent circuler dans les différentes langues qu’elles pratiquent ; • allouer plus de moyens à la seule instance étatique malienne dotée de droits d’ingérence effective, l’Association malienne de radioprotection (Amarap).

Partenariats avec des instituts universitaires

L’Aracf envisage de créer à Faléa une antenne académique permanente et pluridisciplinaire. Etudiants, doctorants et post-doctorants y séjourneraient plusieurs semaines ou mois afin d’y étudier et analyser les changements en cours sous leurs aspects historiques, sociologiques, géologiques, ethnologiques, culturels, géographiques et écologiques. Elle est ainsi en quête de bourses et d’une minuscule infrastructure de communication satellitaire qui désenclaverait la population de Faléa et permettrait aux stagiaires, étudiants, doctorants, etc. d’effectuer leurs travaux sur place.

Services écologiques

LaRevueDurable se permet d’ajouter deux suggestions : l’une est de déterminer la valeur des services écologiques qu’offrent les écosystèmes présents à Faléa, la faune et la flore, les sols, les forêts et les nappes phréatiques dont une partie substantielle sera inévitablement souillée et risque d’être irrémédiablement perdue. Cette étude s’inscrirait dans le chantier ouvert par l’évaluation internationale intitulée « Économie des écosystèmes et de la biodiversité ».

Une telle évaluation devrait en outre inclure une analyse des gagnants et des perdants …..

 

 

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DECLARATION DE BAKARA

Position des organisations citoyennes africaines sur la gestion de l’exploitaion des ressources extractives en général et de l’uranium en particulier

DECLARATION DE BAKARA

vendredi 18 septembre 2009, par Mani Kamara

 

Position des organisations citoyennes africaines sur la gestion de l’exploitation des ressources extractives en général et de l’uranium en particulier.

 

 

A L’ISSUE DE L’ATELIER DE RÉFLEXION ET DE FORMATION SUR L’EXPLOITATION DE L’URANIUM TENU A BAKARA, AU TCHAD, DU 14 AU 18 SEPTEMBRE 2009

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Nous, Organisations Non Gouvernementales des Droits de l’Homme, de défense de l’Environnement et de Développement du Tchad, de la République Centrafricaine, du Cameroun et du Niger, réunies à N’Djamena, du 14 au 18 septembre 2009, pour apprendre et réfléchir sur les défis liés à l’exploration et à l’exploitation de l’uranium dans nos pays, avons constaté que le secteur de l’extraction de l’uranium dans plusieurs pays d’Afrique reste caractérisé par :

L’opacité autour de l’attribution des contrats liés à l’exploitation des ressources extractives en général et de l’uranium en particulier, ainsi que sur le calcul et la gestion des revenus générés,

Le manque et la difficulté d’accès à l’information et de transparence de la part des industries extractives ainsi que des Gouvernements en matière de publication des risques liés à l’exploitation de l’uranium ;

La faiblesse des cadres institutionnels gouvernant l’exploitation de cette ressource stratégique et dangereuse, ainsi que le faible contrôle des activités d’exploitation de l’uranium,

Les risques importants que pose cette ressource sur la santé des travailleurs, de leurs familles et des populations riveraines,

Préoccupés par le fait que dans la plupart de nos pays, quelques individus seulement, sans consultation aucune, continuent à prendre les décisions sur l’exploitation de nos ressources dans la plus grande opacité alors que la majorité de citoyens reste sous-informés et croupit dans la misère ;

Convaincus que l’histoire de l’exploitation de l’uranium dans le monde montre une dégradation importante des conditions de travail et de santé des employés des mines d’uranium et de leurs familles ;

Conscients que les lois régissant l’exploitation de l’uranium devenant plus exigeantes en Occident, les compagnies se ruent sur l’Afrique du fait de la faiblesse de son contexte institutionnel ;

Inquiets que les risques liés à l’exploitation de l’uranium sont latents et peuvent ressurgir plusieurs années après la fin du travail ou de la fermeture de la mine ;

Avertis que même dans les pays industrialisés exploitant l’uranium, la gestion des déchets liés à l’exploitation de ce minerai constitue un problème de santé publique qui trouve difficilement des solutions de nature à protéger la santé des populations, et qu’en Afrique, au vu de la faiblesse de nos institutions notre crainte est encore plus grande ;

Demandons à nos dirigeants politiques de :

Publier de manière systématique toutes les informations relatives aux opérations liées à l’exploitation de toutes les ressources naturelles en général et de l’uranium en particulier pour les rendre accessibles au public ;

Faire respecter au moins les standards et normes nationales et internationales en vigueur dans le secteur de l’exploitation de l’uranium ;

Harmoniser les politiques minières pour une meilleure réponse aux défis sociaux, environnementaux et transfrontaliers à travers une concertation et un dialogue renforcés et d’adoption d’instruments juridiques régionaux à l’image de ce qui se fait dans la zone CEDEAO ;

• Assurer un suivi de proximité de toutes les activités des compagnies, et protéger leurs populations face aux agissements des compagnies ;

• Mettre en place de manière systématique des cadres spécifiques de suivi des activités des compagnies d’exploitation de l’uranium, et adopter un nouvel ensemble de lois spécifiques au secteur de l’uranium, notamment des lois sur la radioprotection ;

• Définir les modalités de collecte des moyens financiers qui seront nécessaires pour assurer le réaménagement des sites après exploitation et la surveillance radiologique sur les années post exploitation ;

• Évaluer de manière précise et exhaustive les doses et les risques subis par les travailleurs et les populations riveraines, et assurer le bénéfice de la présomption du lien de causalité pour les travailleurs n’ayant pas bénéficié dans le passé d’un suivi radiologique et médical adapté ;

• Se doter des moyens pour assurer une surveillance indépendante des activités minières.

• Garantir la sécurité et la protection des acteurs de la société civile qui travaillent dans le domaine de la transparence et de la bonne gouvernance ;

• Affecter une part conséquente des revenus aux régions productrices. Recommandons aux compagnies exploitantes l’uranium dans nos différents pays, de :

• Rendre les contrats accessibles au grand public ;

• Faire connaître leurs politiques en matière de responsabilité sociale et environnementale

• Adhérer à l’ITIE (Initiative de Transparence dans les Industries Extractives) dans les pays où elles opèrent et déclarer les revenus qu’elles paient aux Etats et à leurs démembrements ;

• Appliquer minutieusement les lois des pays dans lesquels elles opèrent, combinées aux normes, pratiques et standards internationaux généralement acceptés dans l’industrie de l’uranium ;

• Abaisser les quantités de gaz radioactif rejetées dans l’atmosphère par les bouches d’aération des mines ;

• Limiter les risques de pollution des nappes phréatiques et limiter les quantités d’eau soutirées des nappes phréatiques non renouvelables ;

• Appliquer les mesures sanitaires appropriées pendant leurs opérations, mais aussi plusieurs décennies après la fermeture des mines, vu que les impacts sanitaires de l’uranium peuvent se déclarer plusieurs années après la fin de leurs opérations ;

• Récupérer toutes les ferrailles et autres matériaux contaminés disséminés dans le domaine public et les mettre en sécurité afin de protéger la population ;

• Définir les modalités de confinement à long terme des dizaines de millions de tonnes de déchets radioactifs déjà produits par les usines d’extraction de l’uranium ;

• Éviter d’utiliser les déchets provenant des carrières et galeries pour remblayer les espaces publics et routes ;

• Mettre en œuvre des dispositifs d’urgence de protection des entreposages de résidus radioactifs (limitation des risques d’envol de poussières radioactives, limitation de l’érosion, etc.) ;

• Prendre en charge la santé complète des travailleurs et de leurs familles pendant et après la fermeture des mines ;

• Appliquer des mesures de sécurité et de protection des travailleurs et de l’environnement appropriées et internationalement acceptées ;

Appelons les organisations de la société civile, de :

• Informer et sensibiliser largement les populations ainsi que les autorités des différents pays sur les risques que comporte l’exploitation de l’Uranium ;

• Préparer les populations des zones concernées par l’exploitation de l’Uranium à s’organiser pour que les impacts négatifs de l’uranium soient minimisés sur leurs vies ;

• Définir, le plus tôt possible avant le début des opérations des compagnies uranifères, un point zéro indépendant décrivant le style et le niveau de vie, la qualité de l’eau, de l’air et du sol, etc. ; afin de comparer ce point zéro avec la situation pendant l’exploitation et après la clôture de la mine ;

• Assurer la protection des droits des populations traversées par des projets d’exploitation de l’uranium ;

• Vérifier le respect de la protection des travailleurs employés dans les mines d’uranium ;

• Participer aux débats sur la transparence et la bonne gouvernance à tous les niveaux ;

• Exiger qu’un suivi sanitaire annuel soit effectué sur les sites miniers, même fermés, et sur les travailleurs et leurs familles pendant plusieurs décennies après la fin des opérations des compagnies d’exploitation de l’uranium.

Sollicitons des partenaires au développement et aux pays du Nord, de :

• Faire du plaidoyer auprès des compagnies exploitant les ressources naturelles en Afrique afin que celles-ci respectent les normes et pratiques internationales ;

• Plaider auprès des Gouvernants africains par l’entremise des Gouvernants européens.

• Faire en sorte que les standards volontaires existants deviennent obligatoires.

• Soutenir aux plans techniques, financiers et sécuritaires les OSC travaillant dans le domaine des ressources naturelles en générale et de l’uranium en particulier.

Nous invitons tous les acteurs impliqués à un dialogue sincère et constructif pour permettre la mise en oeuvre des présentes recommandations.

Fait à BAKARA, le 18 septembre 2009

Les Participants

Voir le lien : http://www.cedcameroun.org/fr/infos…